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Conférence d’affaires 2022 de Longrich Stratégie: Comment créer d’autres sources de revenus ?

Lors de la conférence d’affaires de Longrich Stratégie qui s’est déroulé ce samedi 6 août 2022, à l’hôtel ONOMO, à Bamako , Dr Cyrielle Kenmoe NGHOKEM a présenté a répondu à la question de savoir, comment créer des sources de revenus complémentaire, avec le cas pratique des produits Longrich MALI .

LIVRAISON PAR LA RUSSIE DE DEUX HELICOPTERES DE COMBAT ET DES RADARS AU MALI : Stratégie d’opportunité ou vision à long terme ?

La montée en puissance des Forces Armées Maliennes va de pair avec le renforcement des capacités opérationnelles. Conscientes que l’une ne peut aller sans l’autre, les hautes autorités de la transition s’attèlent au quotidien pour relever les défis de la moralisation de la formation et d’équipements modernes des FAMa. Cette nouvelle coopération semble être fructueuse car elle a permis de doter l’armée malienne d’équipements militaires modernes. En effet, l’Armée a reçu, de la part de la Russie, deux hélicoptères de combat de type MI-24P, des radars de 4ème génération et d’autres équipements. La réception de ces nouveaux équipements de pointe en provenance de la Russie a été fait le  lundi 18 avril 2022 par le Chef d’État-major  général des armées, le Général de division Oumar Diarra. Peut-on affirmer que l’axe Bamako-Moscou se porte bien ? La Russie va-t-elle enfin aider le Mali à sortir de ce bourbier djihado-islamo-terroriste ?

La Fédération de Russie trouve en effet un intérêt à s’implanter en Afrique et dans ce cas spécifique au Mali. Elle renoue tout d’abord des liens avec Bamako qui datent de la Guerre froide. De plus, le marché militaire malien est conséquent en raison des troubles qui y règnent. Enfin, les forces armées maliennes (FAMa) sont principalement équipées de matériels soviétiques. Bamako a même effectué une commande supplémentaire de fusils d’assaut de type kalachnikov à la Russie en 2013.

Rappelons que ces nouveaux équipements viennent s’ajouter aux deux hélicoptères et un radar de dernière génération, qui ont été réceptionnés, le mercredi 30 mars 2022 par le Colonel Sadio Camara, ministre de la Défense et des Anciens Combattants. Ce sujet structurant de la politique étrangère russe est sans doute un facteur de contrat militaire.

Il serait sans doute trop facile de dénoncer un simple opportunisme. Les liens entre Moscou et les anciennes colonies africaines existent depuis l’indépendance de ces pays. La majorité des pays africains ont utilisé des matériels militaires soviétiques durant la Guerre froide. Des liens existent donc depuis des années. Cependant, c’est plutôt la nouvelle stratégie russe qui est intéressante. Le plus vaste pays du monde se sert de son expertise militaire comme d’un outil de soft power au service de son rayonnement international. Après la République Centrafricaine, le Mali peut lui aussi s’enorgueillir d’avoir eu un partenariat pouvant lui permettre d’éradiquer l’hydre terroriste. L’axe Bamako- Moscou en est l’illustration parfaite de ce partenariat gagnant -gagnant. Loin de n’être que du soft power, cette approche est également pragmatique.  Il semble que l’accord militaire conclu avec Bamako est important car depuis cette collaboration la peur a changé de camp et l’ennemi est en débandade. Car l’armée malienne semble non seulement outillée, mais aussi requinquée moralement à bloc pour sa mission régalienne. La coopération Russo Malienne ne serait pas seulement militaire, mais elle s’étendra dans d’autres domaines surtout économiques, car le Mali possède des réserves de terre rare, matière essentielle à la constitution d’appareils technologiques ou encore des mines d’or ainsi que des réserves de pétrole. Ainsi l’accès à ces ressources stratégiques, la participation d’instructeurs militaires russes et la livraison d’armement à Bamako semble donc augurer d’une coopération à long-terme.

L’Afrique n’était pas un espace stratégique prioritaire pour la Russie. Loin de son influence stratégique, soumis à des troubles dans certaines régions, le continent africain fut délaissé à la fin de la Guerre froide. Les sanctions européennes à l’encontre de Moscou en 2014 ont certainement poussé le président Vladimir poutine à développer de nouvelles stratégies.

En définitive, même si l’approche opportuniste de concurrencer une région historiquement liée au bloc occidental n’est pas à démontrer, il est évident que la Russie noue des liens dans l’espoir de durer au Mali.

Assitan DIAKITE

TRANSITION AU MALI : Jusqu’où mèneront les errements de la stratégie de communication à outrance de Choguel ?

Avec une parfaite maîtrise de la rhétorique, il ne rate aucune occasion pour haranguer les Maliens en tenant un discours flattant leur ego. Mais, à force de trop tirer sur son ennemi et d’ouvrir de nouveaux fronts, on finit par réduire le cercle de ses admirateurs.

«La démocratie ne peut pas primer sur la vie et la sécurité des citoyens et de leurs biens… On ne peut pas ramener la vie d’une nation à des élections… La priorité du gouvernement est de restaurer la sécurité…» ! Vous avez compris qu’il s’agit ici des flèches lancées par Dr Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre de la Transition, à ses adversaires politiques dans le pays et aux ennemis du Mali, notamment la Cédéao et la France qui se retrouvent à la même enseigne dans ses sorties médiatiques.

Ces déclarations ont été faites vendredi dernier (4 février 2022) à l’ouverture de la 18e édition du «Festival Ségou art» (Festival sur le Niger). Et comme on pouvait s’y attendre, il a rappelé pour la énième fois que «notre pays est frappé par des sanctions illégales dont le seul objectif est de renverser les institutions et le gouvernement». Mais, à ce rythme, ce ne sont pas la France et la Cédéao qui vont saboter la transition et renverser le gouvernement, mais l’inaction de l’exécutif face aux attentes des Maliens de plus en plus impatients de sentir le changement promis.

Depuis un mois le Mali subit les sanctions de la Cédéao et de l’Uémoa. Les comptes du pays sont bloqués à la banque centrale (BCEAO) et les frontières avec certains pays voisins sont fermées. Et malgré les déclarations mielleuses de patriotisme des opérateurs économiques, les consommateurs constatent chaque jour la hausse constante des prix. Et ce qui fait encore mal, c’est de constater aussi l’incapacité du gouvernement à tenir ses promesses sur le maintien des prix à un niveau raisonnable. Et comme si cela ne suffisait pas, presque tous les moyens de transfert monétaire sont aujourd’hui bloqués entre le Mali et la plupart de nos pays voisins.

Aujourd’hui, nous sommes fiers de nos dirigeants parce qu’ils se sont assumés en remettant la France à sa place et en imposant désormais le respect de notre souveraineté nationale comme une condition sine qua non du partenariat bilatéral et multilatéral avec le Mali.  Mais, à ce rythme, si le président Goïta ne reprend pas réellement les choses en main pour recadrer son PM, il y a fort à craindre que le réveil soit cauchemardesque pour tout le monde.

Profiter de la brèche ouverte par l’Union africaine pour parvenir à un consensus avec la Cédéao

S’affranchir d’une tutelle ne saurait être une fin en soi. Il faut travailler pour conforter ce nouveau statut pour ne plus s’exposer à une telle domination. Inaugurer des Centres de santé de référence (CsRef), lancer des festivals devenus des tribunes de règlements de comptes avec la France… Ce n’est pas ce que les Maliens attendent aujourd’hui du Premier ministre. Mais, qu’il agisse pour sortir le pays de la crise actuelle !

Et pourtant, le président de la Commission de l’Union africaine (UA), Moussa Mahamat Faki, nous avait judicieusement ouvert une brèche par laquelle nos autorités auraient dû s’engouffrer avec une proposition concrète par rapport au chronogramme. Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA a en effet plaidé pour une prolongation de la transition n’excédant pas 16 mois. Une proposition raisonnable même si nos autorités aspirent à au moins 2 ans. Nous sommes convaincus qu’il est possible d’avoir un accord avec la Cédéao sur un chronogramme n’excédant pas 16 à 20 mois. Encore fallait-il faire cette proposition.

Et visiblement ce n’est pas le cas parce que le sommet du jeudi dernier (3 février 2022) a justifié le maintien des sanctions prises le 9 janvier 2022 par l’absence de nouvelles propositions de la part du gouvernement malien. Comme beaucoup d’observateurs, nous sommes  convaincus que ce n’est pas par un bras de fer que nous allons obtenir la levée des sanctions. Autant alors arrêter de distraire la galerie et aller à l’essentiel en proposant un nouvel agenda assorti d’un calendrier électoral avec une durée raisonnable afin «d’atténuer les discordes avec la Cédéao».

Maintenant que tous nos partenaires savent ce que les Maliens veulent et qu’ils sont prêts à payer le prix fort pour y parvenir, il est aisé de pouvoir discuter, dialoguer avec eux au lieu de continuer à jeter  l’huile sur le feu par des déclarations incendiaires du Premier ministre Choguel comme stratégie de communication. Il ne faut pas se voiler la face, nous n’avons pas la capacité diplomatique (même si nous pouvons compter sur la Chine et la Russie au Conseil de sécurité de l’ONU) ni le poids économique suffisant pour tenir tête à la France et la Cédeao. C’est pourquoi il n’est pas judicieux d’ouvrir autant de fronts d’hostilité.

Ce n’est pas en tournant le dos au reste du monde que nous réussirons à redonner au Mali ses lettres de noblesse ! Ce qui ne doit pas être négociable, c’est notre souveraineté et la dignité du peuple malien !

Moussa Bolly

ME KASSOUM TAPO AU SUJET DES SANCTIONS DE LA CEDEAO : « Il n’y a pas de stratégie (…) pour sauver notre économie… »

Des sanctions de la Cedeao à la situation sociopolitique tendue du pays, le président du Mouvement pour la refondation du Mali (Morema), Me Kassoum Tapo, s’est exprimé sur les sujets qui fâchent. L’avocat est apparu sur le plateau de l’émission “En toute liberté” de Djoliba TV comme à son habitude : décontracté. Nous vous proposons un extrait de son intervention. 

Journaliste : il y a eu un chronogramme qui a été proposé à la Cedeao, de 6 mois à 5 ans. Juste après, l’organisation sous-régionale a sanctionné durement le peuple malien.  Des sanctions économiques et financières très sévères. On ne vous a pratiquement pas entendu. La classe politique ne s’est pas prononcée sur les sanctions de la Cedeao. Qu’est-ce qui s’est passé ?

Me Kassoum Tapo : vous voulez qu’on dise quoi ? On n’a jamais applaudi pour ces sanctions. On les a regrettées comme tous les Maliens. Aucun Malien ne peut applaudir et approuver ces sanctions. Au-delà, qui en est responsable ? Ceux qui ont voulu et nous ont amenés à ça, c’est à eux qu’il faut poser la question. C’est eux qui se justifient aujourd’hui sur comment on va s’en sortir. Mais, nous avions dit qu’il fallait éviter qu’on en arrive là. La Cedeao elle-même, il faut savoir reconnaître les choses, ce n’est pas ce que les chefs d’Etat de la Cedeao ont souhaité. Il y a eu combien de sommets avant qu’on arrive aux sanctions ? Donc, si les sanctions arrivent, je pense que ceux qui les ont cherchées et qui veulent braver encore aujourd’hui la communauté internationale doivent en répondre. Qu’est-ce que vous voulez qu’on dise ?

Journaliste : le 14 janvier le peuple malien, à l’appel des autorités de la transition, était justement sorti pour dire non aux sanctions de la Cedeao. Il y avait du monde, c’était la déferlante. Qu’est-ce que vous comprenez  à travers cette mobilisation historique ?

Me Kassoum Tapo : il ne faut pas donner à cette mobilisation le sens qu’elle n’a pas. Pour la première fois de l’histoire politique du Mali, on a appelé à une mobilisation à partir d’un conseil des ministres. Conseil des ministres de la République qui demande à descendre dans la rue. Evidemment, avec la fibre patriotique qui a été mise en jeu, les gens ont répondu.

Je peux vous dire que je n’ai jamais été à une place quelconque en aucune occasion. J’ai fait beaucoup de mouvements estudiantins, oui. Mais responsable politique, je ne suis jamais allé dans la rue. Personne ne m’a vu dans la rue, même pas en mars 1991, à part la marche des avocats. Donc, ce n’est pas la place habituelle que je fréquente ; mais d’esprit, j’étais avec les 4 millions de Maliens. On a dit 4 millions de Maliens, mais d’esprit c’était les 20 millions de Maliens. Les 20 millions de Maliens ont regretté ces sanctions.

Journaliste : Cette grande mobilisation, est-ce que c’est un soutien aux autorités de la transition ou c’est un soutien pour peut-être sortir de la crise ?                  

Me Kassoum Tapo : je crois que c’est une réaction des Maliens, normale et prévisible. Vous savez, le vendredi où la marche a été faite, j’étais dans une mosquée où on nous a invités à regagner la place de l’indépendance. Toutes les mosquées de Bamako (mosquées de vendredi), sans exception,  ont appelé à aller à la place de l’indépendance. C’est le cœur malien qui a répondu. On s’est senti agressé par la Cedeao. Donc quand vous faites face à une agression extérieure, le peuple se mobilise. Cette mobilisation, pour moi, c’est d’abord contre l’agression qu’on a ressentie à travers les sanctions. Et le Mali a réagi à ça. Mais je ne pense pas que c’était un soutien à qui que ce soit.

Journaliste : dès les premières heures de la transition, la classe politique malienne était très bavarde. Vous étiez souvent sur les plateaux pour dénoncer, rappeler à l’organisation des élections. Mais depuis un certain temps on n’a comme l’impression que vous avez baissé la garde. Est-ce pour des raisons stratégiques ou c’est seulement le contexte qui ne s’y prête pas pour vous ?              

Me Kassoum Tapo : Je ne suis pas pour le principe de dire tout le temps tout et n’importe quoi. Ça vous rattrape toujours. Ceux qui étaient dans la rue avant qu’on ne les associe à la transition ont eu tous les mots contre les militaires. Et aujourd’hui, ils sont en train de claironner que c’est la meilleure transition du monde. Mais juste quelques jours avant qu’ils ne viennent aux affaires, ils décriaient cette transition. Moi, depuis le 20 août, est-ce que quelqu’un m’a entendu décrier la transition ? Je n’ai absolument jamais critiqué la transition. Mais, j’ai tout simplement dit qu’il faut respecter la démocratie.  Chaque fois que j’étais sorti, c’était pour défendre des libertés. Quand on a mis des gens injustement en prison, qu’on les a poursuivis, j’ai fait mon travail d’avocat. Mais politiquement est-ce que vous m’avez pas entendu critiquer ou insulter les autorités, les traiter d’illégales ou illégitimes ? Jamais !

Donc, aujourd’hui, il y a une situation qui a surpris tout le monde : les sanctions de la Cedeao et de l’Uemoa. Personne ne s’attendait à une réaction aussi vive. On n’est tous un peu assommés, attristés. Je ne m’en réjouis pas, je ne peux pas le faire. Parce qu’aujourd’hui je vis, ma famille, mes voisins, mes amis, les gens que j’aide tous, je vois comment ils vivent la situation.

Journaliste : Mais les autorités disent qu’elles ont préparé un plan de riposte pour faire face justement à ces sanctions ; que le peuple ne va pas tellement sentir l’effet. Qu’est-ce que vous constatez ?

Me Kassoum Tapo : vous savez, il ne s’agit pas de mettre des tenues camouflées en venant sur la place de l’indépendance pour dire le peuple, le peuple. Ce n’est pas ça !

Aujourd’hui, la réalité sur ce que les Maliens vivent, c’est quoi ? On nous a dit qu’il y a une stratégie pour les 15 années à venir, qui ont été dégagées en si peu de temps par des hommes qui ont participé pendant 30 ans à la vie politique nationale. Aujourd’hui, comme par hasard, en 10 jours ils ont une stratégie pour répondre à ces sanctions.

Journaliste : quand vous parlez de tenue camouflée, vous faites allusion à qui par exemple ?

Me Kassoum Tapo : vous m’avez montré des images, vous les avez vues comme moi. Vous avez parlé d’un sursaut populaire pour sauver le Mali qui est en guerre, etc. Si on met des tenues camouflées comme le Premier ministre éthiopien, on va au front avec des kalachnikovs. Ça, j’aurais compris ! Mais de la place de l’indépendance, on défie la communauté internationale. Et ensuite dire : on a défini des stratégies pour les 15 années à venir. Mais quoi ; qu’est-ce qu’on a fait de concret ? On a eu des opérateurs qui sont venus dire qu’ils vont juguler la crise tout de suite. Ça n’a pas encore commencé la crise. Quelle solution nous a été proposée ? J’ai vu nos autorités se rendre en Mauritanie et en Guinée. Le port de Guinée n’arrive pas à satisfaire les Guinéens, la Mauritanie : la même chose.  Vous croyez que c’est eux qui vont remplacer la Côte d’Ivoire et le Sénégal ? Non !

Journaliste : qu’est-ce que vous allez faire au niveau du Cadre d’échange des partis politiques pour la réussite de la Transition. A un moment vous avez dit clairement qu’à partir du 27 février, date de la fin  normalement de la transition avant la tenue des Assises nationales de Refondation, vous n’alliez pas reconnaître les autorités de la transition. Mais depuis un certain temps on a l’impression que ce n’est plus à l’ordre du jour !       

 Me Kassoum Tapo : Au Cadre, on n’en a jamais fait une fixation. Quand le président a appelé et qu’on s’était rendu compte qu’effectivement on ne pouvait pas faire les élections le 27 février, qu’est-ce qu’on lui a dit : M. le président, appeler tous les Maliens, asseyons-nous, examinons la durée de la transition par rapport au chronogramme électoral. Évaluons le temps perdu et voyons quel délai nécessaire, suffisant, raisonnable il faut pour faire les élections. Parce qu’il était évident pour nous qu’en février on n’aurait pas respecté la date. Mais au lieu de ça, on n’est allé aux Assises pour faire sortir quoi ? On nous a dit que le délai de la transition ne devait même pas faire l’objet de débat. Effectivement, si vous prenez les thématiques, il en avait 13. Il n’y a pas une seule ligne sur le délai de la transition. Mais le résultat c’est quoi ? Le résultat des Assises a été la prolongation de la transition. C’est la seule chose qu’on a retenue. Et d’ailleurs, c’est cela qui a mis le feu aux poudres quand on n’est allé dire à la Cedeao que le peuple malien a décidé cinq (5) ans de transition. C’est cela qui a irrité nos partenaires. Il a de quoi parce qu’à ma connaissance, je n’ai pas participé aux Assises, mais je n’ai pas vu une proposition de cinq (5) ans avec un chronogramme fait par les Assises. On a dit de voir une durée de six (6) mois à cinq (5) ans. Mais si on part dire à la Cedeao : voilà le chronogramme, c’est cinq (5) ans. Alors, ils ont pris ça comme une provocation et ont réagi en conséquence. Mais ce que je veux ajouter, on n’en veut pas à la Cedeao. Mais vous croyez que c’est nous seulement qui souffrons des conséquences de ces sanctions ? Mais l’économie ivoirienne et sénégalaise vont en souffrir. Vous pensez que leurs chefs d’Etat sont des irresponsables ; qu’ils ne savent pas que leurs économies en souffrent et que leurs peuples vont en souffrir aussi ? Vous pensez qu’ils ignorent la souffrance du peuple malien. C’est d’ailleurs pour ça qu’ils ont pris tout ce temps avant les sanctions.

Journaliste : Mais est-ce que nous, nos autorités en ont conscience ; puisque vous dites que les voisins savent, est-ce le cas chez nous ?

Me Kassoum Tapo : on n’en est conscient, puisque j’entends dire que nous sommes des frères, des parents au sein de la Cedeao. Et que c’était un bruit passager. J’espère que le dialogue n’est pas rompu. Je souhaite qu’on dialogue avec  nos partenaires parce qu’on ne peut pas se passer de la Cedeao. Ce n’est pas vrai ! Il n’y a pas de stratégie à court et long terme pour sauver notre économie indépendamment de l’économie des pays de la sous-région et de l’économie mondiale. Parce qu’au-delà de la sous-région, la Bceao participe à l’économie mondiale.

Journaliste : avant de parler des questions de diplomatie, pour l’argument que les autorités de la transition évoquent, le plus souvent, c’est que le contexte sécuritaire ne s’y prête pas pour faire de très bonnes élections. Vous avez organisé vous-mêmes des élections. Est-ce que vous pensez que cet argument tient la route ?

Me Kassoum Tapo : Mais s’il tenait la route on n’allait pas être sanctionné. Ça ne tient pas la route pour une simple raison. Je ne vais pas rappeler les propos des politiques qui sont aux affaires, qui ont dit que la place des militaires se trouve au front. Vous avez entendu combien de fois avant le 24 mai queue la place des militaires était au front et non à Koulouba, dans les bureaux climatisés, et qu’il faut organiser les élections.

Comment voulez-vous, dans le bon sens, que ceux qui sont chargés de la sécurité fassent de la politique ? Le pouvoir politique est issu des urnes, conféré par le peuple à des citoyens politiques qui ont comme boulot de diriger le pays. Ils doivent définir les politiques avec les militaires pour qu’eux, ils assurent la sécurité et non l’inverse.

Journaliste : sauf qu’on a  aussi l’impression que le peuple malien n’est pas tellement pressé pour aller à des élections ?

Me Kassoum Tapo : écoutez, c’est vous qui le dites. Vous savez, le peuple c’est un concept élastique qu’on utilise. On met ce qu’on veut là, dedans. Qui est le peuple ? Quel peuple l’a dit ? Le peuple qui disait avant-hier qu’il faut aller aux élections. Ce n’est pas seulement le Cadre, remémorez-vous des discours et des propos de certains hommes politiques qui ont dit qu’il faut respecter le 27 février. Aujourd’hui, ces sont les mêmes qui viennent nous dire qu’il faut cinq (5) ans.

Journaliste : question de diplomatie ; aujourd’hui, il y a une brouille diplomatique entre le Mali et son partenaire, la France suite à des propos tenus par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Le Mali qui est monté au créneau en expulsant l’ambassadeur de France à Bamako. Quelle réaction faites-vous à cette dernière actualité ?

Me Kassoum Tapo : d’abord que ça soit clair pour tout le monde : je ne suis pas Français, je n’ai qu’une seule nationalité.  Je n’ai aucun intérêt particulier pour la France.

Cela étant clarifié, je pense que ces incidents diplomatiques sont absolument inutiles dans un contexte comme ça. On a dit que le ministre français a eu des propos outrageux. Je veux bien, mais il a dit quoi ? Soyons concrets. Alors, décortiquons ce qu’il a dit en deux sens. Autorités illégitimes ; est-ce que c’est le ministre des Affaires étrangères français le premier qui a tenu ces propos ? Vous vous souvenez des gens qui ont dit que le CNT était illégal et illégitime, et qui ont fait un procès pour ça ? Ils ont dit que le gouvernement était composé, à 20 personnes sur 25, des militaires ou les membres de leurs familles. Que le Premier ministre avait été désigné par le militaire ; que c’était un pouvoir illégitime et illégal. On a même repris illégal et illégitime sans littorale à Bambara. Si un Français répète ça, c’est une analyse politique, ce n’est pas une insulte. Le ministre malien a dit dans son communiqué des propos outrageux, pour moi ce n’est pas le cas.

Deuxièmement, il a dit : vous avez pris des mesures irresponsables, c’est le renvoi des troupes danoises. C’est un jugement politique. Demain si la France avait réagi en renvoyant notre ambassadeur ou comme l’extrême droite française est en train de le demander à l’unanimité : renvoyer les Maliens, fermer l’ambassade du Mali, arrêter les flux monétaires vers le Mali, j’aurais dit que c’était des mesures irresponsables. En tant que Malien, je me serais permis de le dire sans insulter personne. Maintenant, si notre ministre a estimé que c’était une insulte, c’est les Maliens qui ont commencé ces injures.

Abdrahamane Baba Kouyaté