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Le dénouement partiel dans l’affaire des 49 soldats ivoiriens tourne court et débouche sur un nouveau bras de fer: Bamako demande en contrepartie de la libération des 46 soldats l’extradition de Karim Kéïta et Tiéman Hubert Coulibaly

C’est un nouveau rebondissement dans l’affaire dite des 49 Ivoiriens, même s’il n’en reste que 46 après la libération des trois soldates. En vue d’un dénouement total, le Gouvernement de transition demande à la Côte d’Ivoire l’extradition de Karim Kéita et Tieman Hubert Coulibaly, tous deux poursuivis par la justice malienne, respectivement dans la disparition de notre confrère Birama Touré et dans d’éventuelles malversations dans l’achat d’équipements militaires. Ils sont aussi accusés de vouloir déstabiliser le Mali, à partir d’Abidjan.

Cette requête des autorités de la Transition avait longtemps circulé dans les milieux officiels sans être officialisée. Il a fallu attendre le vendredi 9 septembre dernier, à la faveur de la visite à Bamako du Chef de la diplomatie nigériane, non moins émissaire du président Muhammed Buhari, venu apporter son expertise dans la décrispation entre Bamako et Abidjan, pour que l’extradition de personnalités maliennes, exilées du côté de la Lagune Ebriée, soit réaffirmée de vive voix.

L’émissaire nigérian, Geoffrey Onyeama s’est félicité du dénouement partiel dans l’affaire des 49 ivoiriens, ayant conduit à la libération de trois soldates, pour raisons humanitaires, avant d’exhorter les autorités de la Transition à trouver une solution définitive à cette crise.

Pour sa part, le président de la Transition, Colonel Assimi Goita a estimé » judicieux » de trouver une « solution durable » à la question de ces soldats ivoiriens. Il a toutefois émis des réserves, qui témoignent du ressentiment de Bamako vis-à-vis de la Côte d’Ivoire, notamment dans le traitement réservé à des personnalités politiques recherchées par la justice malienne. » Au moment où la Côte d’Ivoire demande la libération de ses soldats, [elle] continue de servir d’asile politique pour certaines personnalités maliennes, faisant l’objet de mandats d’arrêt internationaux, émis par la justice », a déclaré Colonel Assimi Goita. Déplorant le fait que « ces mêmes personnalités bénéficient de la protection de la Côte d’Ivoire pour déstabiliser le Mali « . D’où la nécessité, selon lui, » d’une solution durable, à l’opposé d’une solution à sens unique, qui consisterait à accéder à la demande ivoirienne sans contrepartie pour le Mali «

Bien qu’il se soit abstenu de dévoiler l’identité de ces personnalités, l’allusion est faite au fils de l’ancien président de la République, Karim Kéita, exilé à Abidjan et visé, depuis juillet 2021, par un mandat d’arrêt émis par Interpol dans la mystérieuse disparition du journaliste, Birama Touré. A cela s’ajoute un autre mandat d’arrêt international, émis en juillet 2022 contre l’ancien ministre de la Défense et ancien chef de la diplomatie malienne, Tiéman Hubert Coulibaly, également exilé en Côte d’Ivoire pour » des faits d’atteinte aux biens publics « , dans l’affaire du marché public dit PARAMOUNT, s’inscrivant dans la mise en œuvre de la Loi d’Orientation et de Programmation pour la sécurité intérieure. A ces deux personnalités politiques s’ajoute également un autre homme politique, du nom d’Ibrahima Camara, qui avait, depuis Abidjan, défrayé la chronique en se faisant passer pour le « Président de la transition malienne « . L’intéressé, apprend-on, était, depuis, rentré dans la clandestinité, sous la pression des autorités ivoiriennes. Certaines sources l’annonçaient du côté de Monrovia.

A signaler que le Premier ministre par intérim, Colonel Abdoulaye Maiga avait, lors d’un entretien, diffusé sur l’ORTM, vendredi dernier, insisté sur la judiciarisation de l’affaire des 49 soldats ivoiriens. Avant de déplorer, à l’instar du Colonel Assimi Goita, que des Maliens, poursuivis par la justice, utilisent la Côte d’Ivoire pour attaquer ou perturber la transition.

Cette contrepartie, demandée par les autorités de la Transition, avait été ébruitée, suivant diverses sources concordantes, lors des premières discussions entre Maliens et Ivoiriens, à Lomé. Ce à quoi la partie ivoirienne avait rappelé l’indépendance de la justice.

Aussi, face à ce nouveau rebondissement, qui pourrait nous mener droit vers un éventuel bras de fer, l’affaire de ces soldats ivoiriens, longtemps judiciarisée par les autorités de la Transition, est en passe d’être gagnée par des considérations d’ordre politique et diplomatique. Cela, au regard même de la tournure prise par les évènements et les nombreuses implications qui semblent l’émailler. A commencer par la médiation conduite par le Togo, à la suite de laquelle d’autres bons offices n’ont pas manqué de se manifester, dont celui de l’ONU, de l’Union Africaine, à travers le président Macky Sall, de l’ancien président Nigérian Good Luck Jonathan (médiateur de la crise malienne) ou encore du Burkina Faso, mais, surtout, celui récemment mené par le Nigeria. Et, en dernier ressort, les initiatives conduites par le président du Haut Conseil Islamique du Mali, Chérif Ousmane Madani Haidara, l’Archevêque de Bamako, Cardinal Jean Zerbo et celles d’une délégation de religieux ivoiriens et de la diaspora malienne, établie en Côte d’Ivoire.

A rappeler que la libération des trois soldates ivoiriennes sur les 49 est le résultat de ces tractations tous azimuts.

Certainement que les mêmes initiatives se verront dans l’obligation de se manifester pour trouver un arrangement, voire une stratégie pouvant satisfaire chacune des deux parties et préserver les relations de bon voisinage entre ces deux pays frères.

Abdoulaye DIARRA

DEMANDE DE RETRAIT DES TROUPES DANOISES AU MALI : Est-ce une déclaration de guerre par procuration à la France ?

La France, après avoir essuyé le tir du gouvernement de la transition qui n’a pas hésité à expulser les troupes danoises, s’est concertée avec ses partenaires européens membre du groupement de forces spéciales Takuba au Mali, pour adopter une position commune vis-à-vis des autorités de Bamako. L’une des réponses à cette humiliation infligée à la France et à ses alliés européens a été la sanction de cinq personnalités du régime, notamment le PM Choguel, le Président du CNT le Colonel Diaw, le Ministre de la réconciliation Wagué, le virevoltant Ben le Cerveau et le Ministre des réformes Ikassa Maïga.

Comme une réponse du berger à la bergère l’Union Européenne a répondu à ce qu’elle a qualifié de provocation de plus et de trop de la part de la junte au pouvoir au Mali, en faisant sienne les sanctions individuelles de la CEDEAO à l’encontre des personnalités maliennes. Elle vient d’adopter des nouvelles sanctions contre cinq personnalités en les considérant comme étant des obstacles à la paix. Comme pour dire que la junte au pouvoir, est en plein bras de fer avec Paris. Pour rappel elle  a exigé le départ des soldats danois dès leur arrivés pour nopn autorisation de fouler le sol malien. Les autorités de la transition ont demandé au Danemark de retirer lundi le 24 janvier “immédiatement” le contingent d’hommes qui avait été déployé au Mali pour participer à Takuba, une task force spéciale de plusieurs pays de l’union Européenne initiée par la France et destinée à accompagner les soldats maliens au combat face aux djihadistes.

Cette action de la junte malienne mettra-t-il fin à la présence de Takuba au nord du Mali ?

Le gouvernement de la transition malienne justifie son action par le non-respect des clauses des accords existant entre le Mali et la France et ses alliés. Donc ce déploiement est intervenu sans son consentement. La junte multiplie les pressions sur paris, qui résiste et multiplie ses réactions. En effet, le mardi 25 janvier, la ministre française des Armées, Florence Parly, s’est insurgé contre l’expulsion des forces danoises  en affirmant sa solidarité avec ses partenaires danois, dont le déploiement a été fait sur une base juridique légale, contrairement à ce qu’affirmait la junte malienne. « Nous sommes présents via une invitation claire du gouvernement de transition malien (…) avec nos alliés européens, la France notamment », a de son côté fait valoir le ministre des Affaires étrangères Jeppe Kofod, durant un déplacement à Bruxelles. Le Mali affirme de son côté qu’il n’a pas été informé de l’arrivée des troupes danoise. Le ministre Français des armées et le ministre des affaires étrangères du Danemark  disent avoir reçu une invitation de la part des autorités maliennes.

Ces connotations entre les deux chefs de la diplomatie, ne vont –elles pas aggraver le différend existant déjà entre le Mali et la France ?

En effet, après des restrictions posées dans l’espace aérien malien et la remise en cause des accords de défense qui lient Bamako à Paris, cette demande de retrait du contingent danois constitue une nouvelle difficulté à l’action militaire française et européenne au Mali obligeant  la France à s’interroger sur le chemin  à suivre avec les autorités maliennes depuis plusieurs mois, qui sont accusées d’avoir ouvert les portes du pays aux mercenaires russes de la société privée Wagner. Dans les pays du Sahel où est étalée la force anti-djihadiste Barkhane, le Tchad et le Mali sont désormais dirigés par des militaires. Le coup d’Etat du lundi 24 janvier passé au Burkina Faso complique aussi la tâche à Paris.

Takuba, aujourd’hui forte, de plus de 500 militaires, risque de disparaître, alors que l’objectif de neuf ans d’intervention inscrit dans le plan d’action est loin d’être satisfaisant.

Ainsi, l’existence de Takuba, qui a été lancée en mars 2020 par la France pour partager le fardeau du Mali avec ses partenaires européens, se trouve aujourd’hui menacé, même si, le gouvernement de la transition du Mali multiplie les messages d’hostilité à l’égard de Paris et de ses partenaires.

 

Assitan DIAKITE